Initiation aux fourmis. Prospection
aux anciennes carrières d’Orival
Samedi 28 juillet 2018
Organisateurs Claire (M), Loïc (et
Célian)
Animateurs Marie-Jo, Michel Ameline
RDV à 10h00 au Jardin des Marettes à
Amblie (14480)
Présents 23 personnes : Loïc, Claire, Célian,
Françoise D., Bernard, Léonie, Dominique D., Michel, Isabelle, Virginie, Karin,
Lucien, Hélène, Rémi, Alice, Fabienne, Marie-Jo, Emilie, Bastien, Patrice,
Sébastien, Marlène, Pascal, une assemblée remarquable pour une période de
congés.
Le matin
Les Curieux accueillis chaleureusement au jardin des
Marettes, profitent d’un petit moment d’installation du matériel de projection
et des binoculaires pour se saluer et bavarder amicalement avec un petit café
de bienvenue.
Peu après, c’est en covoiturage que tout ce petit monde se
rend aux carrières d’Orival, lieu prévu pour la récolte des fourmis.
Marie-Jo du Conservatoire, en préambule, nous parle du
site des carrières d’Orival.
Les carrières datent
de l’époque gallo-romaine. Exploitées surtout au début du moyen âge (époque des
grands bâtisseurs de Cathédrales) jusqu’après la guerre de 39/45 (pour la Reconstruction),
elles ont été fermées en 1973. En 2008, le site est classé Réserve Naturelle.
Le Conservatoire d’Espaces Naturels de Basse Normandie les entretiennent depuis
plus de 20 ans. On y exploitait à ciel ouvert la pierre appelée « carreau
d'Orival », calcaire bathonien employé notamment dans la construction de monuments tels que
la cathédrale
de Bayeux, les églises de
Creuilly, de Fontaine Henry, de Thaon, de Coutances, pierres de Caen, etc…Cette
pierre a exportée jusqu’en Angleterre. La proximité de la Seulles qui se jette
dans la Manche a favorisé le transport de ce matériau.
Selon le
Net :
« Outre la présence de roches
affleurantes d'intérêt national sur le plan géologique, l'intérêt principal du
site est d'ordre botanique. On trouve sur le site au moins 6 espèces protégées
au niveau national ou régional : Alisier de Fontainebleau, Gentiane
amère, Orchis
grenouille, Raiponce délicate, Épiaire
raide, Seslérie
bleuâtre. On
trouve également sur le site de nombreuses orchidées ainsi que des zones à bryophytes. La faune est caractéristique des milieux
calcicoles en particulier pour les invertébrés. Parmi les insectes présents, on
trouve l'Argus bleu-nacré,
le Caloptéryx éclatant,
le Criquet des bromes
ou la Libellule déprimée. Les fours à chaux servent pour l'hivernage des
chauves-souris ».
Michel prend alors
la parole pour nous indiquer que l’endroit (Orival) est vierge de données de fourmis. Pour la
validation des déterminations le site AntArea
est fortement recommandé. Celui-ci vérifie les échantillons, il est
conseillé de lui fournir au moins 10 individus récoltés. En France plus de 200
espèces sont déjà répertoriées, 27 dans le Calvados.
Les fourmis sont
des insectes, donc des invertébrés, de la famille des formicidés (Formicidae),
qui est de l'ordre des hyménoptères. Il existe 4 sous familles de
formicidae : les Ponérininae, Myrmicinae, Dolichodérinae et Formicinae.
Ce sont des insectes sociaux, formant
une colonie de nombreux individus issus d’une seule reine. Les ouvrières (qu’on
remarque principalement) sont des femelles aptères. Les mâles sexués et ailés
perdent leurs ailes après la fécondation de la reine. Celle-ci garde le sperme
dans sa spermathèque et passe sa vie à pondre.
Pour l’instant aucune espèce n’est
protégée (liste en préparation) à l’exception des fourmis forestières qui ont
un intérêt pour l’écosystème.
Michel nous remet des petits tubes
en verre rempli d’alcool pour la chasse et le groupe des explorateurs se met en
marche guidé par Marie-Jo. Sur le parcours sinueux qui mène à la carrière
principale, elle nous fera observer l’alisier de Fontainebleau et un alignement
de pierres dressées dont on ne connait pas la fonction originale si ce n’est la
supposition d’une présentation des coupes et qualités du calcaire exploité.
Partout en passant la bonne odeur de
l’origan nous accompagne bien agréablement.
Dans la carrière principale, Michel nous parlera aussi de la vie en
symbiose des fourmis et des papillons lycènes genre Maculinea, en
effet les chenilles de ces espèces ont besoin d’une plante hôte comme toutes
les autres espèces de papillon, mais leur développement nécessite aussi la
présence d’une fourmi hôte ; les chenilles terminent leur phase larvaire dans
des fourmilières, elles sont transportées dans la fourmilière et nourries par
leurs hôtes.
Enfin les Curieux
de Nature se dispersent dans cet endroit magnifique protégé du vent à la faune
et à la flore exceptionnelle. Partout
des multiples vols de zygène (Zygaena
filipendulae) d’argus
bleu-nacré (Lysandra coridon), le
mâle d’un bleu éblouissant, la femelle brune taches oranges au bas des ailes
postérieures.
La récolte de
fourmis est fructueuse en particulier en soulevant les nombreuses pierres
jonchant le sol. Pour plus de variété, on poursuit jusqu’au bout de la
carrière, vers une zone humide.
Chaque découverte
fait l’objet d’une attention particulière où on se regroupe pour observer, partager
et discuter.
Ont été identifiés
de visu sur place au passage : les papillons, machaon, myrtil, amarilis,
la sylvaine, la mégère, l’argus bleu-nacré, la zygène de la filipendule, la
piéride de la rave, le tabac
d’Espagne, Autographa gamma, Euclidia glyphica, Agriphila geniculea
(microlépidoptère), une punaise, réduve immature (réduve pirate ?), un amphibien :
triton palmé en phase terrestre, les coccinelles : la grande coccinelle
orange,(Halyzia sedecimguttata),
la coccinelle à 7 points (Coccinella
septempunctata), la coccinelle à virgule
(Exochomus quadripustulatus), une araignée : l’argiope, un
longicorne : Stictoleptura rubra.
Les fourmis ne
peuvent pas être déterminées précisément car il nous faudra passer par une
étude sérieuse sous binoculaire avec une bonne clé d’identification. Leur
prélèvement s’avère d’ailleurs pas si facile que ça, car elles sont très vives,
il faut les arrêter par tous les moyens, mettre le doigt dessus, de même, elles
mordent facilement en mettant la main dans une fourmilière ce qui n’est pas
très agréable…
Bonne image :
Un œuf de machaon fraichement pondu sur une apiacée qui parait bien petite et
fragile ici pour nourrir la chenille.
Puis le bon
casse-croute vers 13 h 30 au cours duquel les nourritures sont souvent
partagées comme ont l’habitude de faire les Curieux. Un seul ne peut pas le
faire, et c’est bien, car le lait n’est pas la boisson préférée de notre
association !
2 photos de d’argus
bleu-nacré, 1 femelle sur basquette, et 1 mâle dans la nature.
L’après-midi
Retour dans la
salle de réunion du jardin des Marettes. Michel prépare un échantillon de
fourmis aux 3 binos présentes et projette sur écran la clé de détermination des
formicidae. En introduction, une description précise de toutes les parties de
la fourmi doit nous familiariser avec les termes de l’anatomie de la
bête : Tête avec mandibule, clipeus (entre mandibule et tête), ocelles sur
front, antennes à segments, scape (1er segment). Thorax. Pétiole
(entre thorax et abdomen). Gastre (abdomen) généralement 5 segments.
Quelques
compléments sur les particularités des fourmis sont aussi délivrés : les
œufs non fécondés sont toujours des mâles, les reines peuvent vivre plusieurs
années. Essentiellement il y a des fourmis forestières et des fourmis des
champs. Ces animaux pratiquent souvent l’élevage des pucerons dont elles
extraient le miellat. En Normandie le nombre des espèces est d’environ 60
individus, en Manche 27. Les fourmis récoltées ici, sont des fourmis dites
esclavagistes (elles peuvent coloniser un autre nid, ou être colonisées à leur
tour).
Littérature conseillée :
Fourmis
de France. Plus de 100 espèces décrites,
Rumsaïs Blatrix, Christophe Galkowski, Claude Lebas, Philippe Wegnez, Delachaux
et Niestlé.
Wegnez, P., Ignace, D., Fichefet, V., Hardy, M., Plume, T. & Timmermann, M., 2012. Fourmis de Wallonie (2003 – 2011). Publication du Département de l'Étude du Milieu Naturel et Agricole (SPW-DGARNE), Série " Faune - Flore - Habitat " n° 8, Gembloux, 272 pp.
La revue l’Argiope n° 39 publiée par Manche Nature : Fourmis de la manche :
les 31 espèces connues.
Site Internet AntArea :
antarea.fr/fourmi/
222 espèces référencées.
Michel
nous guide à partir d’une clé imagée projetée sur écran pour la détermination
de la fourmi sous bino. Chronologiquement les détails à observer sont : le
pétiole (1 ou 2 unités), l’étranglement du gastre (plus ou moins accentué), la
dépression du dos ou l’absence ou non d’ocelles sur la tête. Ces trois critères
permettent de déterminer généralement la sous famille : en l’occurrence,
ici une Formicinae.
Un
petit truc rapide pour la sous famille : les Myrmicinae ont un double
pétiole et les Formicinae un seul
Juste
une petite pause désaltérante et bien agréable en raison de la forte chaleur
dans la salle : jus de pommes et cidre bio production du Jardin des
Marettes.
Après
ce travail, il faut essayer de déterminer le taxon, ce qui n’est pas un petit
travail : un certains nombres de détails très précis et peu facile à voir
sont nécessaires selon la clé de détermination : je cite : bête peu
poilue ou peu de poils, triangle frontal mat ou brillant, fourmi trouvée dans une fourmilière ou pas, épinotum
(Partie située à l'arrière de la face supérieure du thorax), rond ou moins
rond, poils sur le pronotum, joues noires ou rouge sur les joues, pétiole fin
et clair ou pétiole épais et foncé, quant au nombres de dents des mandibules,
il est abandonné, etc., cet exercice ayant quand même duré environ 1 heure et
demie. On identifie enfin Formica cunicularia, une réussite, vérifiée par sa
présence sur la carte de France bien sûr.
Bref, il est recommandé de pratiquer pour arriver à
faire une détermination assez rapide, mais c’est un peu comme toutes les
déterminations sérieuses de toutes les espèces d’insectes.
Les
Curieux de Nature remercient chaleureusement les organisateurs et animateurs.
Un grand coup de chapeau à Michel (et il en a un beau !) qui s’est donné
beaucoup de mal pour cette initiation aux fourmis.
C’est
vers 17 heures et demie / 18 heures, que tous les membres de l’association se
quittent la tête pleine de bons souvenirs agréables et instructifs.
Une
liste des nos découvertes myrmicéennes sera
communiquée ultérieurement après identifications.