samedi 4 décembre 2021

Comm' Nat : week-end forêt et programmation à la Cour (Les Mont d'Aunay)

  Les 4 et 5 décembre derniers avait lieu notre traditionnel week-end de fin d’année, qui nous permet de dresser les grandes lignes de notre programme de l’année suivante. En 2020, il n’avait pu se tenir, crise sanitaire oblige ; cette année, nous avons fait le choix de le maintenir, même si en comité restreint.

Les Curieuses et Curieux présent·e·s : Célian, Loïc, Claire, Hélène, Françoise, Muriel, Andrée, Karin, Lucien, Bénédicte, Sébastien. 

Arrivé·e·s au gîte, nous constatons que nous sommes hébergé·e·s au pied de la forêt de Valcongrain et avons ainsi à portée de bottes de belles balades sans avoir à prendre les voitures : un luxe ! Et c’est ainsi qu’après un repas partagé, notre petit groupe suit Sébastien, gestionnaire pour l’ONF, qui nous présente cette forêt de 375 hectares. Elle a notamment la particularité d’avoir acquis très récemment son statut de forêt domaniale (1985), à la différence de la majorité des autres forêts françaises qui sont devenues domaniales suite à la Révolution française. Une autre de ses originalités est son caractère vallonné, montagnard même diront certain·e·s, qui peut facilement dérouter, au sens propre comme au figuré, le promeneur. Sébastien nous invite donc à la prudence ! Le et la Curieux·se de nature adoptant en général un comportement relativement grégaire, nous n’aurons à déplorer aucune perte. Les récoltes sont maigres, malgré les courageux·ses· naturalistes soulevant écorces, pierres et souches. Mais quelques mousses, oiseaux, araignées (comme Amaurobius fenestralis), coléoptères et gastéropodes sont notés (voir liste ci-dessous). 





Une collecte de feuilles par Célian et sa maman sur la route du retour est examinée au goûter : 16 espèces différentes sont déterminées. 




 De retour au gîte, bien lové·e·s dans de confortables canapés au coin du feu, nous nous émerveillons devant les vidéos de Muriel et Lucien. Armé·e·s de leur caméra de chasse à vision nocturne et de beaucoup de patience, nos deux naturalistes passionné·e·s ont filmé tout au long de l’année dans leur jardin, et à proximité, la vie qui s’anime à la tombée de la nuit (notons aussi quelques scènes inédites en journée) : batailles épiques de hérissons, hardes populeuses de sangliers et de marcassins, chevreuils curieux ou encore écureuils gourmands… ils s’en passe des choses juste sous notre nez, sans que nous nous en doutions ! Vous trouverez en cliquant sur le lien ci-après (et en s'armant d'un peu de patience)  une belle vidéo de Muriel sur la martre.

lien



 Le stage de fin d’année est souvent l’occasion de proposer un repas sur une thématique originale, permettant de titiller le côté joueur et gourmand qui fait le propre du ou de la Curieux.se de nature. Après la raclette végétarienne et la tartiflette déclinée par région française, le thème proposé cette année était « cucurbitacées, salées ou sucrées ». 

Au menu, donc, se trouvaient ce soir-là : 

  salade froide de courge spaghetti, lardons et roquefort de Claire


soupe de potimarron, pommes et marrons de Karine

gratins de courges par Françoise et Dédée




 et enfin marbré chocolat-potiron par Hélène.

Pari tenu !

Pour terminer cette belle journée, notre malicieuse Dédée nous a tiré de son sac un jeu, curieux mélange de « dessinez c’est gagné » et du « téléphone arabe », qui a déclenché beaucoup de fous rires autour de la table, des thermos de café se transformant sous la plume des dessinatrices… en kangourous.

 Après une (plus ou moins) bonne nuit et un chaleureux petit-déjeuner, les participant·e·s se retrouvent autour de la table pour travailler sur le programme 2022. Des premières idées posées en CA sont proposées, affinées, d’autres projets émergent, le calendrier se remplit petit à petit tout au long de la matinée, avec le plaisir anticipé des bons moments que nous passerons ensemble.

Un dernier repas, puis nous prenons le temps d’une ultime balade en forêt, avant de nous quitter… chacun repart chez lui, la tête pleine de bestioles et de paysages, l’estomac rempli de bons petits plats et le cœur riche de la bienveillance et de la convivialité à nouveau partagées.



 Photos : Claire Mouquet, Loïc Chéreau et Françoise Guézou

Observations du week-end :

Gastéropodes : Phenacolinas major, Discus rotondatus (Discus rond), Lehmannia marginata (Limace des bois)

Araignées : Cicurina cicur, Atypus affinis (Mygale à chaussettes), Amaurobius ferox, Amaurobius fenestralis, Diaea dorsata (Thomise tricolore), Coelotes terrestris

Cloportes : Oniscus asellus (Aselle des murs), Philoscia affinis

Mille-pattes : Lithobius piceus, Lithobius forficatus, Cryptops hortensis, Geophilus easoni

Insectes hyménoptères : Vespa velutina (Frelon asiatique ou frelon à pattes jaunes)

Insectes coléoptères : Carabus granulatus (Carabe granuleux), Carabus intricatus (Carabe embrouillé), Nebria brevicollis (Nébrie à cou bref), Abax ovalis, Phosphuga atrata (Petit Silphe noir), Rhyzobius chrysomeloides

Flore vasculaire herbacée : Molinia (Molinie), Polypodium vulgare (Polypode commun), Carex pendula (Laîche pendante), Euphorbia amygdaloides (Euphorbe des bois), Calluna vulgaris (Fausse bruyère), Hypericum androsaemum (Millepertuis androsème)

Arbres : Peuplier, Bouleau verruqueux, Erable sycomore, Erable champêtre, Orme, Sapin de Vancouver, Pin sylvestre, Hêtre, Châtaigner, Chêne américain, Chêne sessile, Charme, Merisier, Noisetier, Houx, Lierre.

Mousses : Polytrichum formosum, Hookeria lucens, Plagiothecium undulatum, Plagiochila asplenioides

Champignons : Hydnum repandum (Pied-de-mouton)

Oiseaux : Rouge-gorge, Merle noir, Buse variable, Pic noir, Pinson des arbres, Corneille noire

Amphibiens : Bufo spinosus (Crapaud épineux)

Mammifères : Sciurus vulgaris (Ecureuil roux) : présence d’un nid




  













samedi 27 novembre 2021

 

19 ème atelier de restauration de l'herbier de Corbière,

Muséum d'Histoire Naturelle de Cherbourg,

samedi 27 novembre 2021.


« Curieuses et Curieux » présents pour cet agréable travail : Nicole, Gabrielle, Véronique, Juliette, Françoise, Muriel, Karin, Lucien, Claire, Loïc, Mélusine, Anne-Marie, Hélène P. ; Ainsi qu’Hélène « de Tatihou », qui vient nous prêter main forte. Patrick et Rémi, de la Société des Sciences, sont venus nous saluer. Et Francis est là, bien sûr, en maître de cérémonie.

Rendez-vous donné dès 09h15. Mais, selon les moyens de transport, pour parvenir tout au nord de la presqu'île du Cotentin, les arrivées sont échelonnées. Personne ne s'est envolé malgré la tempête (qui nous a hélas privés de profiter du parc Emmanuel Liais… fermé par sécurité.)

Quel plaisir de se retrouver pour ce travail de restauration ! Notre précédente rencontre « amicale, utile et botanique » remontait à février 2020. Je vous laisse deviner la raison de ces empêchements de restaurer en rond…

Nous pensions reprendre nos habitudes : que nenni ! Finis les collages avec le pistolet. Francis nous propose de travailler « à l'ancienne », à l'aide de petites bandes de papier découpées finement, que l’on enduit d’une colle blanche à leurs extrémités, à l’aide d’un pinceau, puis que l’on dispose à cheval sur les tiges, voire les parties fines de la plante. Tout cela assure un bon maintien sur la planche de travail.

Karin au travail (photo Lucien)


Au hasard des planches, Anne-Marie découvre des petits œufs blancs de... l’azuré des moulières, séchés sur sa plante-hôte, la gentiane des marais (Gentiana pneumonanthe). Hélène P. travaille sur un Asplenium Erectum, récolté en 1891 par Cyrus Pringle : l’occasion pour Francis de nous montrer l’un des premiers « selfie » de l’histoire de la photographie ! De même, lors de la séance, des planches à restaurer mentionnent des plantes récoltées par Nelly Mirich : une des trop rares botanistes de cette fin du dix-neuvième siècle, ce milieu scientifique étant essentiellement masculin à cette époque. 



Cyrus Pringle, en 1888, en Arizona (source Wikipedia)


Naturellement ces efforts creusent les estomacs : pause déjeuner au sympathique Club Dinette. Le « cheese-cake vanille, coulis de crème de marrons » obtient la meilleure note.

Le temps de l'après-midi passe également très vite, dans une ambiance à la fois studieuse et joyeuse. Mais la méthode dite « des languettes » demande plus de temps, d’habileté, de minutie, de patience… Aussi avons-nous restauré 250 planches, soit moitié moins que d'habitude. Cependant, en reprenant les comptes faits lors du précédent atelier, on arrive à un total de 11150 planches restaurées par les Curieux de Nature.  

Francis conseille Muriel (photo Lucien) 


La nuit tombée, les trois dernières à partir doivent prendre le train de 18h41 pour Bayeux.

Nous nous quittons sur cette jolie conclusion de Muriel : « Les herbiers sont presque éternels. »

Merci Francis ! Merci Monsieur Corbière !

C'est avec grand plaisir que nous espérons vous retrouver samedi 19 février 2022 !



samedi 6 novembre 2021

Forêt fossile de Quintefeuille samedi 6 novembre 2021

Forêt fossile de Quintefeuille à Asnelles (14)

Guide : Mr Bernard Langlais  (de l'association Tourbière 14)

Samedi 6 Novembre 2021

Rendez-vous à 14h45 sur le parking de la Provence à Ver-sur-mer pour une descente sur l'estran en suivant le jusant - Le retour se fera avant la marée basse à 18h.

« A marée basse sur la plage d'Asnelles, apparaissent puis disparaissent au gré des tempêtes d'hiver des bancs de tourbe, roche tendre et légère, qui renferme notamment des troncs et des souches d'arbres, témoins d'une ancienne forêt engloutie par la mer. Cette forêt appelée "La Forêt de Quintefeuille", qui s'étendait d'Arromanches à Luc-sur-mer, s'est développée entre moins 9000 et moins 5000 ans puis a été submergée il y a moins 5000 à moins 4000 ans.

Les tourbes, sables et argiles de la plage d’Asnelles ont fait l’objet de nombreuses études depuis le milieu du XIXe siècle. Y ont été trouvés des restes de chênes, de hêtres, de pins ou de bouleaux, des noisetiers et leurs noisettes, des noyaux de cerises, de nombreux restes d’animaux (bisons, aurochs, chevaux, loups, renards, cerfs, sangliers…), des coquilles de mollusques, gastéropodes, bivalves, ainsi que des traces du passage des hommes (ossements, habitats, outils…) depuis des silex du Néolithique jusqu'à des céramiques de la période gallo-romaine. »

(Extrait du PDF de l'association Tourbière 14  http://www.asnelles.fr/wp-content/uploads/2016/03/3.1.Foret-de-quintefeuille.pdf

 

 

 

Etaient présents : Gabrielle, Hubert, Odile, La Dom, Marie Jo, Karin, Lucien, Agnès, Hélène, Rémi, Andrée, Dominique D, et quelques personnes hors association.

Guide : Bernard Langlais

Au rendez-vous Bernard nous accueille chaleureusement et aussitôt nous parle de l’estran qui est entrain de se découvrir avec la marée, mais il commence par remonter le temps pour écrire son histoire :

A la glaciation de Würm (115 000 à 11 700 ans avant le présent), le niveau général des mers était environ 120 m en dessous du niveau actuel, si bien que devant nous, à Ver sur Mer, s’étendait une immense vallée qui allait de la France à l’Angleterre, la Manche était un gros fleuve recevant les eaux de la calotte glaciaire, des autres fleuves comme la Seine, Rhin, Tamise, etc. Entre moins 9000 et moins 5000 ans, des animaux y vivaient comme le renne, le mammouth, le rhinocéros laineux, l’auroch (bovidé), mégacéros (grand cervidé), saïga (antilope), chevaux sauvages, bisons, etc. les paysages étaient comparables aux toundras ou steppes actuelles.

Entre 9200 et 8000 avant notre ère, le climat actuel s’installe progressivement. Les forêts de feuillus et les prairies remplacent la steppe. Alors sur place, Homo sapiens trouve dans les fruits du noisetier et du chêne de quoi assurer sa survie alimentaire. Aidé d’une redoutable arme, l’arc, il chasse également cerfs, chevreuils et sangliers en concurrence avec les ours, les loups ou les lynx de la région.

La montée des eaux dans la vallée de la Manche se fait petit à petit suite au réchauffement climatique, qui fait fondre la calotte glaciaire, ainsi il est admis que l’Angleterre est devenue pratiquement une ile à partir de 6500 ans avant JC. Ultérieurement, les terres encore émergées ont été touchées par un tsunami provoqué par un glissement de terrain. La forêt de Quintefeuille s’est trouvée engloutie  sous les eaux. Les plantes et animaux ont disparu et se sont fossilisés. Les lieux de vie d'anciennes colonies humaines de chasseurs-cueilleurs sont attestés par d’anciens foyers et de dallage en pierres. Les traces de ce passé se découvrent à chaque marée.


Sitôt sur place on remarque au loin quelques oiseaux marins comme le grand cormoran, l’aigrette garzette, le bécasseau sanderling, les mouettes et goélands.

Il faut regarder attentivement sous ses pieds, et notre guide nous fait remarquer une roche blanche affleurant le sable c’est la couche du stratotype bathonien (calcaire oolithique du Jurassique). Remarquez les jolies couleurs des bottes ci-dessus, les Curieux n’ont qu’à bien se tenir.


Un peu plus loin les racines d’un gros chêne d’environ 1 m de diamètre, splendide !

Puis la chasse aux fossiles est donnée, à chacun de trouver la « perle rare » !

Voici deux escargots des bois millénaires semblables aux nôtres actuellement (famille des Helicidae)…

Piqué par Bernard, le reste de la tourbière côtière sur son substrat du calcaire bathonien. L’épaisseur de cette tourbe, grande réserve d’eau douce, a été estimée parfois jusqu’à 12 m de hauteur, cela semble impressionnant. Toutes ces traces se remarquent de Port en Bessin jusqu’à la baie de Seine.

Une coquille d’huitre fossile…pied de cheval actuel…

Le sol est jonché des restes denses des arbustes et buissons préhistoriques, un certain tableau artistique…On trouve aussi des piquets d’étalière en bois à ne pas confondre avec la préhistoire, d’époque récente, ils servaient à maintenir des filets tendus pour la pêche locale côtière au 20ème siècle.


 

Enfin des traces humaines, ces éclats de silex nous indiquent que l’homme préhistorique taillait ici les rognons de silex pour en faire des outils (haches polies, racloirs, grattoirs) ou des armes (pointes de flèche).

On trouve aussi parfois des déchets de nourriture (os) nous indique notre animateur mais nous n’en avons pas hélas trouvé…

Ces recherches ne sont pas faciles, mais notre guide a l’œil…et le bon !

Voilà un magnifique nucléus : un nucléus (bloc de pierre débité pour produire des éclats ou des lames, définition sur le net)

D’autres traces humaines plus récentes : celles de l’exploitation de la tourbe pour se chauffer (carré de prélèvement ci-dessus).

Pour plus d’information un petit ouvrage est conseillé.

Signalons aussi une intéressante, et récente publication du Muséum d’Histoire Naturelle, dans la revue Naturae (de 2020) : Nouvelle étude paléoenvironnementale de la Forêt de Quintefeuille d’après les cortèges malacologiques holocènes : du passé à l’actuel. Un travail de Quentin WACKENHEIM, et Al. Cette étude met notamment en avant le caractère plutôt progressif de la transgression marine, et ses conséquences sur la diversité de la faune et de la flore répertoriés in situ. En voici le lien Internet : https://sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/hd/naturae2020a7pdfa_0.pdf

Mais il est plus de 18 heures et avec l’heure d’hiver le soleil se couche déjà, les découvreurs remontent sur la berge et sont gentiment invités par notre conseiller à voir les trouvailles de plusieurs décennies de fouilles archéologiques en son atelier.

Hélas,  nous n’avons pas vu, dans l’atelier, des pièces d’époque, mais des reproductions faites par Bernard Langlais, avec les matériaux et les outils probablement utilisés à l’époque.

Cependant exceptionnellement, à cette sortie, une entorse grave à notre habitude a été faite : nous avons bu les paroles de notre guide, si bien que nous n’avons même pas pensé au goûter !!!!

Merci bien aux organisateurs de notre association et surtout à notre pilote compétent agréable et plein d’humour qui nous a fait découvrir les vestiges de cette fameuse forêt de Quintefeuille